Histoire de Sari d’Orcino
Le village de Sari est peu présent dans les livres traitant de l’histoire de la Corse, mais quelques allusions nous en laissent entrevoir l’importance, dans l’histoire des Cinarchesi.
Un site découvert entre 1966 et 1968 a mis en évidence du matériel remontant au néolithique terminal (IIIe millénaire avant JC). Il se situe sur le Monte Lazzu qui domine le Liamone (actuellement sur la commune de Casaglione). Il témoigne d’une extraordinaire activité agricole à l’époque néolithique. Les abris rocheux (taffoni) servaient de sépultures à l’âge du feu et les aires de concassage du grain sont multiples. Mais ces recherches préhistoriques sont récentes (1920-1975) et l’on connaît mieux la suite des événements.
L’Antiquité gréco-latine (du IIe siècle avant JC au IIe siècle après JC), on retrouve sur la carte de Ptolémée d’Alexandrie (140 av.JC) Ourkinion : ville portuaire située à l’embouchure de la Liscia, dans le Golfe de Sagone. Le site « Ourkinia » s’est étendu à toute la Cinarca. Devenu Urcinium en latin, il a donné en français le nom d’Orcino.
On retrouve sur cette carte, sur le collines, un village qui s’appelle Sermigion, peut-être Sari ou Sarrola, mais aussi peut-être Sermano tant ces cartes sont peu précises.
Dès le IVe siècle
Il existe un diocèse de Sagone, très étendu puisqu’il remonte jusqu’à Galéria. En déshérence pendant quelques années, il est remis en fonction en 591 par le Pape d’alors.
XIe-XIIe siècle : entrée dans l’ère d’influence toscane
C’est là qu’apparaît la communauté chrétienne de Saint Jean Baptiste comportant 2000 âmes environ. La Cinarca s’étendait à l’époque jusqu’à Appietto. C’est alors que se construit, vraisemblablement sur les ruines d’une église paléochrétienne (IVe Siècle après JC), l’actuelle église Saint Jean-Baptiste (1125-1140), avec une nef unique respectant l’orientation est (abside)-ouest. Elle est située à un mille de chaque village. Elle se trouve actuellement à l’état de ruine consolidée. Classée monument historique depuis 1976, elle est décrite par Mme Moracchini-Mazel, dans « La Corse Romane ». Une description en a aussi été faite par Monseigneur Mascardi, Evèque de Marianna qui, lors de sa visite apostolique en 1587, a fait l’inventaire des églises du Diocèse de Sagone, alors très étendu.
Il a également décrit Saint Martin, qui était alors une église romane, sise près de l’église actuelle (voir St Martin). St Jean était la Piévanie de Cinarca et toutes les églises lui payaient la dîme jusqu’en 1638, date à laquelle le titre de Piévan a été supprimé.
Le XI –XIIe siècle est également le début de la légende des Cinarchesi
Ugo Colonna avait deux fils : Bianco et Cinarco, ancètres mythiques d’un lignage seigneurial dont les membres seront mieux connus après le XIIIe siècle, avec Guido de Cinarca puis les seigneurs feudataires à l’époque aragonaise XIV-XVe siècle, qui a succédé à l’ère génoise. Les luttes intestines étaient permanentes, tantôt soutenues par les Pisans, tantôt par les Gênois.
Dans une lettre d’Ambroggio de Negri à l’office Saint Georges qui l’a chargé de la répression contre les régions soutenant le dernier Comte de Corse Ghjuvan Paulu da Leca, on note que cent cinquante familles furent chassées vers la marine et interdites de retour vers les terres : De la Pieve di Cinarcha abiamo dessabitato Sari et Lopigna et Arro che sono foco cento cinquanta.( Archives génoises ; primi canc., 17.6.1489),
En 1491, le gouverneur génois signale que Sagri, village fortifié de la montagne, a été le premier a recevoir Ghjuvan Paulu da Leca lors de son retour et l’avait hébergé un mois. Le village avait été reconstruit sans autorisation après la destruction de ses maisons en 1489. in La Corse au XVe siècle d’A Franzini.Ed. Piazzola.
Nul doute que Sari paya encore son soutien lors de la dernière guerre de GP da Leca en 1501 !
Plusieurs sources citent que d’immenses ruines de châteaux se trouvent au-dessus du village actuel ou que l’on peut encore voir au XIXe les restes de trois châteaux dans le village.
D’après les écrits de Monseigneur Giustiniani, Sari au XVIe est constitué des hameaux de Cardolaccia, Panicale, Bertolache, Canale, a Tempagnola, a Costa et Ugliastru.
Daté du XVe par les historiens, le village laisse apparaître des traces plus anciennes comme des restes de poteries estimées du VIIIe voire plus anciennes pour d’autres.
Les alentours recèlent de sites bien plus anciens en cours d’estimation.
Pour se persuader de l’importance stratégique du lieu où est bâti le village, il suffit d’observer sa situation : c’est le village le plus reculé, accroché à la montagne San Damianu qui en interdit l’accès et c’est le plus ouvert sur la vallée. On peut de là voir arriver le danger et observer le château de Cinarca tenu par chacun des Seigneurs dirigeant le « Statu Cinarchese » qui s’étendait de Galeria à Bunifaziu, incluant le cortenais et le Niolu.
Une suite ininterrompue d’éperons rocheux permettait sans aucun doute une surveillance facile et accrue et la chaîne montagneuse ferme tout accès à des troupes nombreuses. Des restes de sites de surveillance sont visibles sur chaque crête et sommet.
Rasé une fois et peut-être deux, Sari reste le chef-lieu de canton et l’on peut se persuader de son importance lorsque l’on sait que tous les terrains stratégiques des alentours appartiennent ou appartenaient à des Sarais. C’est le cas du site du château de Cinarca pourtant éloigné du village (aujourd’hui sur Tiuccia, commune de Casaglione), de celui de l’église pievane de San Ghjuvan Battista di Cinarca (église romane du XIe siècle), de la pointe du Monte grossu, du San Damianu et du Santu Liseu, sans doutes fortifiés, sommets les plus hauts de la région.
D’hier à aujourd’hui …
Sur le plan Terrier, ancêtre du cadastre actuel, réalisé lors de la cession de la Corse à la France, après l’ère génoise, la commune de Sari s’étendait jusqu’à la mer, englobant une partie du Casaglione actuel. Mais la montagne était alors plus prisée que le littoral où sévissaient les invasions barbaresques puis la malaria. Lors de la scission, vers 1855, Sari resta donc un village de montagne.
Jusqu’au 1er janvier 1840, tous les registres étaient rédigés en italien…
En 1845, d’après le cadastre Napoléonien, il y avait 167 maisons, réparties en quatre hameaux : Acuansu (94), Bartolaccia (10), Acuangiu (26), Cardolaccia (27). On dénombrait 9 moulins, 8 aires, 3 forges et 23 fours, individuels ou collectifs.Un « Conseil de Fabrique » comportant 5 à 6 membres, clercs ou laïcs, dont le curé et le maire, administrait les biens de l’église, jusqu’à la loi de 1905, complétée en 1908.
Avant 1914, la population vivait en autarcie et le village comptait 942 habitants. On y trouvait alors : 11 cafés, 8 épiceries, 6 moulins à blé, 4 pressoirs à huile, 2 à 3 fours par quartier, 2 écoles (une pour les filles, une pour les garçons), 5 curés (1 pièvan, 1 vicaire et 3 curés vivant dans leur famille), 16 moines franciscains, 1 juge de paix, 1 greffier, 1 notaire. La gendarmerie a occupé la maison Bonelli avant d’intégrer l’actuelle caserne. A Sari en 1900, ont été enregistrés 31 naissances (14 garçons et 17 filles), 18 décès et 5 mariages. 40 % des enfants mouraient avant 5 ans et la moitié n’atteignait pas la 1ere année, voire le 1er mois. La population de Sari était de 2200 âmes en 1778, 942 en 1912, 240 en 1990, 263 en 1999 et 271 au dernier recensement en 2005.
Les vins de Sari d’Orcino sont très renommés depuis le 19e siècle. Ils jouissent d’une grande réputation et eurent de nombreux prix en particulier à l’exposition de Londres à la fin du 19e siècle. Tout récemment, des médailles d’or ont sanctionné la réputation qu’ils méritent à juste titre.
Les maires élus
De 1871 à 1877 Olivieri Pascal, de 1877 à 1878 : Albertini Pascal, en 1878 : Piani Ignace, de 1878 à 1882 : Albertini Pascal, de 1882 à 1883 : Stefani Mathieu, de 1883 à 1887 : Albertini Pascal, de 1887 à 1893 : Padovani Xavier, de 1893 à 1896 : Albertini Pascal, de 1896 à 1912 : Peretti Dominique, César, de 1912 à 1919 : Stefanini Lucien, de 1919 à 1925 : Olivieri Mathieu, de 1925 à 1935 : Stefanini Augustin, de 1935 à 1943 : Olivieri Mathieu, de 1943 à 1945 : Mattei Antoine, de 1945 à 1989 : Piani Michel, de 1989 à 2008 : Jacqueline Luciani, depuis 2008 : Pinelli Michel.
Nos célébrités
Pierre Bonardi, écrivain corsiste • Jean Biondi, ancien ministre • Louis Blanc •